Kāla काल, le temps
Que fait donc le temps, que nous trame-t-il ?
Il flèche dans nos cœurs illusionnante vie
et semble un funambule ne pouvant revenir.
Il marque chaque pas de pétales endormis.
Son fil, telle une corde, se tend ou se relâche,
jouant son plus beau chant à nos aubes conquêtes,
il déchire nos voiles à ses heures sanguines.
Nous le filons, dit-on, sur des soieries tranquilles.
Nous le perlons de pourpre ou de nacre discrète,
mais il blesse nos doigts maladroits ou habiles,
lorsqu’on le perd quand on n’a pas de tête.
« Infaçonnablement », il se joue de lui-même
et geint qu’on lui laisse de nécessaires pauses.
Jamais il ne les prend tant que la lune veille,
nous dérobant alors le sens de « nos je t’aime ».
Ainsi, nous jouons à son étrange but.
Nous filtrons pour lui, l’or de nos intentions,
devenons orfèvres pour son effervescence
ou porteurs d’offrandes pour son visage annuel.
Dans ses jours et ses nuits, il s’affiche de fêtes
et les rituels humains en son honneur l’enivrent.
Il jongle avec les nombres et jamais il ne triche,
passant à notre insu au dedans de nos têtes.
De la même façon qu’il fit de nous des êtres
lumineux et superbes en nos jeunes sommets,
Il fait courber nos monts et dessine à nos yeux,
les profondes vallées de nos anciennes crêtes.
Il cadence le pouls de nos poignets fragiles
et stresse trop souvent nos amis d’aujourd’hui.
Hommes connectés, à tout, sauf à la vie
qui peut se vivre simple sous un pommier fleuri.
Que celui qui s’arrête ou du moins ralentit,
sache écouter le vent ou faire briller la pluie.
Immobile et assis, comme souvent vous l’êtes,
quand vous quittez le monde et devenez yogis.
Alors, c’est à vous seuls, enfin, qu’il se prête,
ce temps maudit, ce temps chéri.
Jaya Yogācārya
©Centre Jaya de Yoga Vedanta ile de la Réunion & métropole
remerciements à C.Pellorce pour sa correction