- "Le stress" 1ère partie
Je vous invite depuis des années sur le chemin de la connaissance spirituelle et nous avons défriché ensemble de nombreux sentiers aussi passionnants les uns que les autres. Nous avons beaucoup médité sur des thématiques différentes, avons longuement partagé des réflexions profondes dans des domaines divers.
Que ce soit le travail sur le corps, sur l’énergie, la conscience, les mécanismes mentaux, sur les rapports de l’esprit avec la matière, sur les concepts du temps, les grandes traditions orientales, la vie mystique, les concepts métaphysiques les plus pointus, sur le langage, le monde contemporain, etc., tous ces supports d’étude eurent un point en commun, la pratique yogique.
Bien sûr, selon le sujet d’étude du moment, l’intérêt diffère chez chacun d’entre vous. Certains sont plus cérébraux, d’autres plus émotionnels ou plus psychologiques, plus pragmatiques, d’autres plus ésotériques voire psychiques.
Ce qui touche assurément un plus grand nombre est le champ émotionnel..
Lorsque le cœur entre en jeu, il fédère même les cartésiens les plus endurcis.
Si les émotions font frissonner le cœur et le corps, tout se passe cependant à la source dans notre cerveau. Nous allons y revenir.
Parmi les justifications premières qui vous ont amenés à pratiquer le yoga, je doute qu’elles furent celles de la simple curiosité.
Il y a chez un grand nombre, la nécessité de trouver des clés pour un problème de santé, de stress, de vide existentiel, de conflit intérieur ou relationnel.
Il y a aussi la pure démarche spirituelle, l’aspiration à l’éveil qui définit l’intention d’une minorité.
Si vous êtes venus au yoga par curiosité et que vous avez eu la chance d’en saisir sa profondeur, c’est que le yoga a porté sur vous sa double bénédiction, la rencontre et le début de l’éveil.
Quelle fut votre surprise de découvrir en vous le chercheur céleste !
Beaucoup essayent de commencer ce chemin. Le yoga est à la mode !
Le manque de persévérance, d’exigence pour soi-même, d’aspiration à s’élever, en amène une majorité sur des voies de garage.
Leur approche est souvent polluée par de nombreux filtres :
– handicaps physiques, mentaux, addictions, paresse, etc.,
– idées préconçues de la pratique, fausses attentes,
– préjugés dus à des filtres sociaux culturels du moment associant le yoga à un genre post soixante-huitard, renvoyant l’image négative d’une corporation de personnes un peu souples en mal d’exotisme spirituel, affublées de pantalons bouffants ou de leggings fluo, lotus et encens en arrière plan.
– désinformation existante dans le marché du bien-être entre les véritables enseignements et les voies opportunistes du moment.
Si vous êtes installés à présent dans votre pratique, c’est que vous avez su discerner le vrai du faux et êtes devenus la preuve auprès des vôtres, des bienfaits de votre démarche.
Vous avez su faire confiance à votre bon sens pour discerner le bon du mauvais, l’authentique du douteux, l’expérimenté de l’incompétent.
Vous avez su nous faire confiance.
Si vous avez quitté le chemin, vous avez quitté le chemin de l’éveil.
Nous allons donc poursuivre avec la même joie et la même passion, cette quête intelligente.
Nous allons ce soir parler de nos émotions, particulièrement du stress et de son processus neurologique et basique.
Le yoga, avant d’être considéré à sa juste valeur comme la voie de l’éveil, est considéré par un plus grand nombre comme la pratique miraculeuse qui élimine le stress.
Nous associons souvent ce stress-là, à la vie affairée quotidienne, professionnelle, familiale dans une société devenue rapide et compétitive où il nous faut être multitâche et productif. Le stress ne se réduit pas à ces seules causes bien sûr et peu de gens aujourd’hui en sont à l’abri.
Le stress est une réaction de défense à une agression (maladie, deuil, guerre, séparation, perte d’emploi, accident, etc.).
Le stress de la majorité des hommes contemporains n’est plus le stress primaire créé par une situation vitale de prédateur-proie, de danger-mort.
Nous n’avons plus à nous défendre sans cesse contre les éléments bien que les effets délétères déjà là du changement climatique, font apparaitre des phénomènes naturels plus dévastateurs qui vont devenir des nouvelles sources d’inquiétude et de grand stress ( tsunami, tornades, incendies..) pour un grand nombre.
Les primates évolués que nous sommes avons encore en nous et dans notre cerveau les processus primitifs comportementaux en cas de stress.
Le stress nous fait fonctionner en mode dégradé dans le corps.
Si vous devez tenir, bras tendu, une petite balle qui pèse 10gr durant 1 heure, elle pèsera de plus en plus.
Vous allez fonctionner dans un mode physique dégradé mais qui tient.
C’est ainsi que nous fonctionnons, par exemple, dans l’excès de travail. Si vous devez tenir pour assurer vos responsabilités au bout d’un moment plus ou moins long selon votre niveau d’endurance, votre santé commencera à se dégrader.
Nous pouvons tenir aussi très longtemps pour encaisser une situation stressante sans prendre conscience de la dégradation souterraine qu’elle crée en nous.
Le burnout est la bulle qui remonte à la surface et éclate.
Si le stress semble néfaste pour beaucoup, il peut être aussi nécessaire à la motivation et la réussite de certaines situations (compétition sportive, examen, discours, spectacle, etc.), le trac à parler en public pouvant présenter ces deux aspects.
Cet état anxieux réveillant un mécanisme instinctif de fuite mélangé à la lutte est fréquent dans le trac. Un esprit plus « zen », voire très relâché dans une même situation peut résulter soit d’un professionnalisme, soit d’une aptitude naturelle d’orateur, soit « d’un je-m’en-foutisme », soit d’une conscience supérieure parfaitement détachée qui sait relativiser.
Une même situation peut vous amener à la totale inhibition, à savoir un état de prostration où il vous est impossible d’agir.
Ainsi donc, soit vous avez une passion dans la vie et un réel talent à gérer des situations de challenge pour la vivre, soit vous vous appuyez sur le stress pour justifier votre propre motivation, rendant la vie plus excitante face à un vide existentiel.
Beaucoup de contemporains, par le biais des nombreuses plateformes d’exhibition en tous genres des réseaux sociaux, sont très axés sur la recherche de la reconnaissance et du succès via des mises en situation semblant audacieuses voire stressantes.
La plupart du temps, elles sont vécues dans des situations de selfies qui ne sont pas si audacieuses que cela, ce qui justifie l’apparente décontraction.
Lorsque ces situations à risque impliquant l’excitation qu’apporte un certain défi sont mal gérées, c’est le dérapage qui peut être fatal, souvent la conséquence d’une immaturité, d’un égo sur-dimensionné.
Le véritable stress, lorsqu’il est agression, est ressenti intérieurement de façon parfois douloureuse avec un appel inconscient que l’autre ait à notre égard de la compassion.
Le yoga, en vous donnant certaines clés, entre autres, celles d’un plus grand contrôle du système neurovégétatif (digestion, respiration, circulation artérielle et veineuse, pression artérielle, sécrétion et excrétion), mais aussi d’un état d’observateur objectif, d’un mental mis sous contrôle, permet de développer un calme intérieur en situation délicate.
Cette maitrise de soi donne la lucidité et permet de diminuer les importances que vous accordez de façon démesurée aux événements.
En réduisant les importances, vous réduisez les potentiels en excès qui créent dans le champ informationnel de votre réalité, des événements encore plus stressants.
Bien sûr, votre calme risque d’être mal perçu par celui qui est stressé et dans la même situation de stress que vous. Le pratiquant se doit de rester bienveillant et aider l’autre à dé-stresser et non en faire un signe extérieur de supériorité.
C’est une base pédagogique, un code social qui apaise.
Si l’autre, en état de stress devient agressif et dangereux, il peut devenir un adversaire incontrôlable.
C’est finalement la dure loi de la jungle qui revient à nous.
Là encore, votre état d’observateur et votre aptitude à dé-stresser la situation seront cruciaux. Les mécanismes de défense et de survie adaptés aux époques primitives sont toujours prêts à apparaitre chez nous comme chez autrui.
Face à un événement que vous prenez comme agressif, vous n’êtes pas à l’abri, malgré votre pratique régulière, de perdre le contrôle d’une situation, de faire preuve d’immaturité, d’un jugement impulsif, d’aveuglement, de brutalité, voire de violence ou de lâcheté.
Tout cela amoindrit l’estime que l’on a de soi-même et peut être perçu par autrui comme signes de faiblesse et de dramatisation.
Nous mettons en scène l’importance de notre individualité aux yeux de l’autre, et ce, parfois à notre insu, par des mécanismes encore primitifs voire inconscients.
Les disputes en sont une belle illustration.
Or, les pratiques yogiques destinées à optimiser tous vos plans et agissant sur la dimension physiologique, doivent être accompagnées de changements profonds et personnels, de prises de conscience.
Ces changements permettront d’agir en partie sur les fonctions instinctives. Elles le feront par l’impact qu’aura sur les régions primitives, les parties du cerveau où se développent les fonctions supérieures et cognitives, voire la conscience.
Si nous nous sommes relativement libérés des situations de dangers immédiats,« proie-prédateur », survie, par notre évolution et notre socialisation, nous vivons cependant un paradoxe.
L’animal sauvage qui pourrait vivre un stress permanent ne l’est finalement qu’en cas de danger immédiat alors que l’homme civilisé passe une grande partie de son temps à stresser sans être en réel danger.
Tout le stress et tout événement nécessite toujours, à intensité moindre et heureusement, des réactions de fuite, de lutte ou d’inhibition.
L’homme ne sait plus faire la différence entre le danger de mort et les désagréments de l’existence. Le conformisme y est dû en partie et la moindre contrariété dérange.
Quel que soit le ressenti de cette contrariété, elle déclenche des alertes biologiques et des réactions plus ou moins instinctives.
Dans une situation conflictuelle, par exemple un problème hiérarchique professionnel, si la fuite et la lutte ne sont réellement possibles, dans le rapport supérieur/inférieur, votre inhibition constituera la source d’un état dépressif ultérieur.
La totale inhibition est de se laisser manger...
La reconnaissance par la hiérarchie enlèvera le stress potentiel et vous n’aurez plus à réagir, puisque vous ne vous sentez plus en danger.
Autrement dit, même si nous pouvons adapter nos réactions en estimant le danger du stress, nous changeons de stratégie face aux obstacles et nos critères de choix de stratégie vont puiser dans des mécanismes stéréotypés et primitifs.
Développer le pouvoir de la conscience supérieure et l’énergie qui va avec, permet aux fonctions plus élaborées du cerveau de limiter le stress et nous aider à discerner la meilleure attitude.
Finalement, beaucoup de faits pris pour des agressions sont relatifs à chacun.
Ce qui vexe l’un fait sourire l’autre.
Le chant des cigales stresse certains et en enchante d’autres…
Le stress serait-il alors une erreur de jugement ?
Dans le cas primitif du lion prêt à vous dévorer, une panoplie de signes physiologiques vont se mettre en éveil. Par exemple, votre corps va être le terrain de contractions musculaires, d’oxygénation et respiration accélérée, de vision réactive et rapide si vous devez fuir. Si vous devez lutter, il y aura un afflux sanguin, une puissance en éveil total. Si inhibition, il y aura suspension des mouvements, paralysie, ralentissement du souffle, ralentissement des sécrétions odeurs, rythme, etc.
Mais si vous stressez pour une feuille d’impôts qui vient de tomber, cela signifie que le stress contemporain est en grande partie généré par l’incohérence du mental ou de l’intellect à disproportionner ou mal ordonnancer ses valeurs de références.
Ce stress est cognitif et intérieur même s’il reste une réaction du cerveau primitif, dit reptilien.
Le yoga a toujours clamé la nécessité de développer une conscience supérieure et propose des outils ancestraux.
Il le fait certes par l’identification des mécanismes mentaux, la sollicitation intellectuelle par le savoir et le raisonnement métaphysique. Il le fait aussi par les techniques associant la respiration, des concentrations poussées sur certaines zones, des mudra (gestes précis), et surtout, il se préoccupe beaucoup de la zone préfrontale du néocortex cérébral par l’activation des cakra supérieurs.
Ces zones sont reconnues aujourd’hui jouer un rôle essentiel dans les mécanismes que nous venons de voir précédemment et dans le comportement humain plus généralement.
Elles sont reconnues comme étant encore indisponibles car obstruées dans leurs activités chez le commun des mortels, d’où les réactions inappropriées en cas de danger et dans bien d’autres domaines.
Il n’est pas bien difficile de constater l’immaturité actuelle d’un plus grand nombre.
Accéder et activer ces parties-là comme le fait le yoga, c’est ouvrir la porte qui permet d’amener l’homme contemporain à une plus grande cohérence comportementale et la clairvoyance de sa réelle nature.
Le yoga le savait déjà !
Hari Om Tat Sat
Jaya yogācāryaḥ
Bibliographie ;
« L’intelligence du stress » de Jacques Fradin aux edts Eyrolles
– Adaptation et commentaire de Jaya yogācāryaḥ
©Centre Jaya de Yoga Vedanta La Réunion & Métropole
Remerciements à C. Pellorce pour sa correction